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couverture Ce que je dirais aux Martiens

Jack Handey

Ce que je dirais aux Martiens

& autres menaces voilées







C’est bien beau d’aller chercher des traces de vie sur Mars, mais si on tombe sur un Martien, on lui dit quoi ? À cette question, l’humoriste Jack Handey apporte une réponse des plus caustiques, ainsi qu’à bien d’autres problèmes absurdes : comment préparer son squelette pour qu’il soit le plus effrayant possible après sa mort ? Au volant, aimez-vous renverser les auto-stoppeurs, et pourquoi ? Peut-on se comporter en bon voisin quand on habite à côté du couple Dracula ? Saviez-vous qu’Alfred Einstein et Al Capone étaient les meilleurs amis du monde ? Connaissez-vous Toonces, le chat qui savait conduire ?

Ce recueil de plus de quarante textes comiques, loufoques et décapants, signé par l’un des plus grands humoristes américains contemporains (à découvrir absolument), détendra les neurones, ainsi que les zygomatiques, de tous les amateurs éclairés d’humour noir et nonsensique de haut vol, de Robert Benchley à Woody Allen, et des amateurs de stand-up de qualité.


Parution : 16 septembre 2021

Couverture de Killoffer

Traduit de l’anglais (États-Unis) par Frédéric Brument

« Les Insensés » n°43

208 pages – 20 euros

ISBN : 978-2-37498-193-2

L’AUTEUR


© Sara Stathas

Jack Handey


Texan d’origine, mais sans doute non armé, sinon de mauvais esprit, Jack Handey vit à Santa Fe (Nouveau-Mexique) avec sa femme, son chien et ses chats. Jusque-là tout va bien. Mais il est aussi écrivain d’humour pour de nombreuses revues (The New Yorker, Outside, Playboy, Punch…) et fut auteur de sketches pour la populaire émission TV « The Saturday Night Live » sur la NBC, qui lui valurent plusieurs prix.

La présente anthologie inédite réunit ses meilleurs textes courts écrits sur une trentaine d’années. Jack Handey a par ailleurs publié un unique roman « tropical », Mésaventures à Honolulu, traduit en français en 2015 et salué par la presse.

Extrait : « « Je suis une légende »

Je suis une légende


On raconte que, lorsque la lune d’octobre est pleine, que les marais et les prés sont recouverts d’une brume sinistre, je poserai ma bière et j’irai me balader dans les rues.

D’après la légende, mes cheveux seront hérissés d’épis rebelles, à force de rester allongé sur le canapé toute la journée. Je marcherai en titubant d’une démarche balourde, les bras tendus devant moi. Personne ne sait pourquoi je marche ainsi. Certains disent que c’est pour être prêt au cas où je trébucherais. D’autres prétendent que c’est pour m’assurer de ne pas me prendre une toile d’araignée en plein visage.

Quand je me trouve loin de chez moi, beaucoup d’autochtones effrayés signalent avoir entendu un hurlement épouvantable, à vous glacer le sang. C’est la partie de ma légende qui me blesse le plus, car je pense qu’ils parlent de ma façon de chanter.

Certaines rumeurs prétendent que, si l’on m’aborde lors de mes balades de minuit et qu’on chante : « Jack Handey, Jack Handey, donne-moi des bonbons », je donnerai des bonbons. Ne comptez pas là-dessus. J’en ai besoin, de ces bonbons.

On raconte que je pourchasse les jeunes amants, et que si je regarde par la fenêtre de leur chambre et les surprends en train de faire l’amour, je resterai là à les épier de mes yeux rouges et ardents. Mais je ne cherche pas les jeunes amants ; je suis en général à la recherche d’autre chose, comme mon trésor perdu, un truc comme ça. S’il arrive que je tombe par hasard sur deux personnes qui font l’amour, j’en profite juste pour les regarder, car les mœurs des humains suscitent ma curiosité.

On dit que je suis capable de me transformer en chauve-souris. J’y arrive, en effet, mais pas très bien. Ce que je fais sans doute le mieux, c’est débarquer à une fête et me transformer en quelqu’un qui a l’air d’avoir été invité. Et malheur à celui qui dénonce mon imposture, car il sera payé en retour d’un sifflement hideux, venant des pneus de sa voiture.

On susurre que je peux vous sucer le sang. D’autres disent que je peux commencer à raconter une blague, mais que je m’emmêle et ne me souviens plus de la suite de la blague, alors je la recommence du début encore et encore, jusqu’à vous rendre fou. Mais ce n’est pas ma faute. Voyez-vous, je suis le fruit d’une union coupable entre un homme et ce que les gens de cette région appellent une « wou-man ».

Certains des habitants de cette ville croient en mon existence, d’autres non. Mais si je n’existe pas, comment expliquez-vous ces rayures faites par un crochet autour de la serrure de votre portière de voiture, ou le cintre jeté dans les buissons ? Hélas, même ceux qui croient en moi sont réticents à me prêter de l’argent.

Quelques personnes disent que j’existe, mais qu’en réalité je suis mort. À titre de preuve, ils montrent la vieille pierre tombale dans le cimetière avec mon nom gravé dessus. Mais je me suis déjà excusé pour ça et j’ai accepté d’effectuer des travaux d’intérêt général.

La vérité, c’est que je vis dans un étrange au-delà, quelque part entre les morts et les gens qui sont dehors à faire du vélo, ou des trucs comme ça.

Les gens demandent sans cesse s’il y a quelque chose qu’ils peuvent brandir devant moi pour m’effrayer ou me repousser. Oui : un bébé qui hurle, par exemple. La légende mentionne aussi ma peur du feu, mais franchement, qui n’a pas peur du feu ? Ouvrez les yeux, bon sang.

Pour être honnête, à peu près tout ce que vous brandirez devant moi est susceptible de me faire peur. La seule exception qui me vienne à l’esprit, c’est un cornet de glace ; encore faut-il que la glace n’ait pas une forme effrayante.

La légende raconte que, si la lumière du soleil m’atteint, je me dissipe en un tas de poussière. C’est vrai.

Peut-on m’arrêter avec des balles ou des coups de massue ? Bien sûr que oui ! Qu’est-ce que vous croyez ?! Et j’apprécierais aussi que vous ne pointiez pas votre torche électrique dans mes yeux.

Comment cette malédiction m’est-elle tombée dessus ? Je vais vous le dire. J’ai été mordu, mordu par un loup. Et pas un loup ordinaire, mais une créature appelée « pinscher ». Un pinscher appartenant à mon soi-disant ami Don. Depuis lors, je suis contraint d’errer dans la nuit, tel un pinscher.

On prétend que mes errances nocturnes ne prendront fin que le jour où je m’unirai avec mon véritable amour. Malheureusement, je ne connais même pas le nom de cette fille française qui joue dans le film La Piscine. Et à moins que je découvre l’indicatif pour appeler la France, mon amour est probablement condamné.

Peut-être que cette malédiction disparaîtra un jour comme par magie. Je me lèverai de bonne heure, je me pointerai du doigt dans la glace et je me dirai : « Tu vas faire des trucs formidables aujourd’hui. » Non, attendez, ça, c’est une autre malédiction.

Alors je rôde. En général, surtout les nuits du vendredi et du samedi, et puis, comme je l’ai déjà précisé, la lune doit être pleine et la brume tout recouvrir. Mais, pour être franc, ça pourrait être aussi n’importe quelle autre nuit en semaine.

Extrait : « Pensées profondes & souvenirs flous »

Je n’avais jamais mangé de chien de ma vie, et je n’avais aucune intention de commencer maintenant. « Resservez-moi juste un bout du copilote », dis-je en tendant mon assiette.


Pour moi, la boxe est comme un ballet, sauf qu’il n’y a pas de musique, pas de chorégraphie et que les danseurs se tapent dessus.


C’est facile de rester assis et de se dire qu’on aimerait avoir plus d’argent. J’imagine que c’est ce que j’apprécie là-dedans. C’est facile. Juste rester assis là, en se balançant d’avant en arrière, à penser à tout cet argent.


Je crois qu’il faut rendre le monde plus sûr pour nos enfants, mais pas pour les enfants de nos enfants, car je ne pense pas que les enfants devraient avoir des relations sexuelles.


Petit, quand nous allions faire un tour dans la voiture familiale, j’adorais pencher la tête à la fenêtre, jusqu’au jour où nous avons croisé une voiture qui roulait en sens inverse et que ma tête a cogné celle d’un chien.