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couverture Opération Renard du désert

Spike Milligan

Opération Renard du désert

Mémoires de guerre tome 2

« Désespérément drôle, vivant, vulgaire… » (The Sunday Times)


« – Continuez comme ça, Milligan. Je crois pouvoir vous faire réformer pour raisons de santé mentale.

– C’est comme ça que j’ai été admis, mon lieutenant. »


Après Mon rôle dans la chute d’Adolf Hitler (Wombat, 2017), voici enfin le deuxième tome inédit en français des « Mémoires de guerre » de Spike Milligan, une épopée narrée comme un monologue tragi-comique, truffé d’anecdotes parfois embarrassantes pour l’auteur et néanmoins édifiantes pour mieux comprendre la guerre, vue d’en bas.

Ce récit, portant sur une période allant de janvier à mai 1943, couvre l’Opération Torch en Algérie et la campagne de Tunisie, qui mèneront à la victoire des troupes alliées en Afrique du Nord.

Simple artilleur âgé d’à peine vingt-cinq ans, Spike décrit les événements à l’échelle d’un individu moyen (voire au-dessous de la moyenne), d’un post-adolescent obsédé par les filles et le jazz. Ici, peu d’idéologie, et encore moins de culte de l’héroïsme et du sacrifice, mais une franche camaraderie de garnements en culottes courtes. Un témoignage vécu aussi divertissant qu’instructif, à faire lire dans les écoles comme dans les maisons de retraite !


Traduit de l’anglais par Thierry Beauchamp

Avec 50 illustrations & photos de Spike Milligan

Couverture d’Emmanuel Guibert

Collection « Les Insensés » n° 34


Parution : 1er mars 2018

256 pages – 22 euros

ISBN : 978-2-37498-102-4


Spike Milligan


© DR

Né en Inde, irlandais d’origine, Spike Milligan (1918-2002) est considéré comme le plus grand auteur comique anglais de la seconde moitié du XXe siècle, aussi populaire en Grande-Bretagne qu’un Coluche ou un Desproges en France.

Jeune soldat pendant la Seconde Guerre mondiale, puis musicien dans un orchestre de jazz, il devient dans les années 1950, avec Peter Sellers et Harry Secombe, l’auteur vedette du « Goon Show », émission radio déjantée de la BBC, admirée aussi bien par Marcel Gotlib et John Lennon que par les Monty Python (« Spike Milligan est notre Dieu à tous », dixit John Cleese).

Comédien et écrivain prolifique, auteur de nombreux pastiches et de rares romans (dont Le Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande, Wombat, 2015), il signait dans les années 1970 avec ses authentiques « Mémoires de guerre » son œuvre la plus lue outre-Manche.


Marqué à jamais par son expérience militaire, Spike Milligan souffrira toute sa vie de dépression et laissera à sa disparition cette fameuse épitaphe : « Je vous avais bien dit que j’étais malade ! »


Extrait d’un entretien entre Marcel Gotlib et les Monty Python réalisé en 1980

Gotlib : Quels sont vos « maîtres » en humour ?

Terry Jones : Puisqu’on est en France, je dirais Jacques Tati. Et un comique anglais, Spike Milligan.

Gotlib : Je l’ai rencontré une fois, on a dîné ensemble.

Terry Jones : Le « Goon Show » a été immensément important pour nous.

Gotlib : Il y a cinq ans, quand on a commencé Fluide glacial, je voulais adapter les sketchs du « Goon Show » en bande dessinée. J’ai eu un rendez-vous avec Spike Milligan à Londres, il était d’accord. Mais quand je m’y suis mis, je me suis rendu compte que je n’y arriverais pas. C’était trop difficile, trop anglais.

Eric Idle : Les gags qu’ils avaient sur le « Goon Show », c’était le plus souvent des gags « à combustion lente ». Il ne se passait rien. Je n’ai pas souvenir d’avoir ri aussi fort devant une autre émission. Je les trouvais hystériques. Surtout, ils allaient loin. Cette idée de prendre des risques avec les gags, c’était quelque chose qu’on admirait tous.


© Propos recueillis par Jacques Diament. (Source : Schnock nº12)


Les livres de Spike Milligan aux Nouvelles Éditions Wombat

Le Règne hystérique de Siffoney Ier, roi d’Irlande (plus d’infos)

Mon rôle dans la chute d’Adolf Hitler (plus d’infos)

Opération Renard du désert

Extrait

« Les discussions sur le sexe occupaient la majeure partie des heures de service des artilleurs. Ce qui se rapprochait le plus d’un passage à l’acte se situait à l’Estaminet de Jean Bart, à moins de quatre cents mètres du camp. Là-bas, en dehors de la bibine, il y avait une serveuse dont les protubérances mammaires flottaient le long du comptoir, escortées par jamais moins d’une centaine de paires d’yeux. De nombreux artilleurs au sang chaud se donnaient une hernie rien qu’en regardant. “Essayez d’en mater un seul à la fois”, leur conseillai-je. L’alcool ne manquait jamais. On se sifflait du muscat à quatre-vingt degrés environ. Cent pour cent bourrés, les artilleurs finissaient dans le caniveau. Ceux qui tenaient encore debout titubaient jusqu’à la plage. Nus, nous nous asseyions dans l’eau pour décuiter. Au cours d’une de ces nuits (celle du 19 janvier 1943), le port d’Alger subit une attaque aérienne. Bientôt le ciel se remplit d’explosions d’obus, de lueurs de détonations et de faisceaux de projecteurs.

Nous profitâmes du spectacle.
– C’est joli, dit Edgington.
– Ouais, c’est du joli, approuvai-je.
L’artilleur Roberts sortit de l’eau pour mettre son casque en acier.
– Quel Allemand va éviter Alger pour te bombarder ? demanda Edgington.
– Il paraît que, par une nuit de pleine lune, un aviateur peut repérer un crâne chauve à six mille mètres d’altitude, répliqua Roberts.
– T’es pas chauve, dis-je.
– J’compte pas attendre jusqu’à la dernière minute, rétorqua Roberts.
Je retournai à la plage et revins avec des cigarettes.
– Merci, dit Edgington, rien de mieux que des clopes mouillées et maculées de sang mélangé à du sable.
Nous nous tûmes. Edgington rompit le silence.
– Milligan ? Vérifie que ta malédiction antiaérienne marche encore.
Je me relevai. J’attendis qu’un avion allemand soit piégé dans le faisceau d’un projecteur, puis je criai :
– J’espère bien que tu vas t’écraser !
– Le pilote est peut–être sourd, dit Edgington.
– J’ESPÈRE BIEN QUE TU VAS T’ÉCRASER !
– On est trop loin, soupira Edgington.
– Oublie.
– Oublie quoi ?
– Tu vois, dis-je. T’as déjà oublié.
Étourdi, il se coucha sur le dos et disparut sous la surface de l’eau. Il réapparut en crachant.
– Cette flotte n’est pas fiable, bredouilla-t-il.
Nous nous rhabillâmes et reprîmes le chemin du retour. Il faisait noir. En bon nyctalope, j’avais toujours une lampe-torche sur moi. Soudain un animal bondit dans le faisceau de lumière.
– Regardez ! m’exclamai-je. Une gerbille !
– Gerbille, mon cul ! C’est un kangourou ! affirma Forest.
– Qu’est-ce que foutrait un kangourou en Afrique ?
– Ta bestiole n’existe pas, Milligan, dit Edgington. T’as inventé le nom.
– Sur la Bible que c’est vrai !
– Sur la Bible ? T’es un agnostique !
– OK ! Je le jure sur Picsou magazine !
Le défi de minuit retentit :
– Halte ! Qui va là ?
– Hitler, répondis-je.
– Impossible ! Il est rentré il y a dix minutes.
– On ignore qui on est. On fait partie des Amnésiques Anonymes de l’Armée.
– Quel est le mot de passe ?
– On abandonne. Quel est le mot de passe ?
– J’attends ! répliqua la sentinelle.
– Nous aussi… Tu peux nous donner un indice ?
– L’indice est : « Quel est le mot de passe ? »
– Une minute, dit Edgington. Je l’ai écrit sur un bout de papier… Aaaah ! Le mot de passe est « poisson ».
– Non, ça, c’était celui de la nuit dernière.
– Frites ?
– Non.
– Shirley Temple ?
– J’sais pas pourquoi ils m’ont mis de faction, soupira la sentinelle démoralisée. Ces deux dernières heures, soixante-dix gus se sont pointés et y en a pas eu un pour se rappeler le mot de passe. Tu parles d’une perte de temps ! Que Churchill aille se faire foutre !
Nous l’acclamâmes bruyamment et il nous laissa entrer. »


© Spike Milligan Prod / Nouvelles Éditions Wombat, 2018